Téléportation : Space Opera

Vous venez de terminer le Cycle de Dune de Frank Herbert en audio, magnifiquement lu par le talentueux Benjamin Jungers, et quelle aventure ce fût ! Jamais rassasié de la planète Arrakis, vous décidez de faire une excursion en librairie pour agrandir votre bibliothèque avec le format papier de la saga. Vos post-its de couleurs attendent sagement à la maison que vous en décoriez quasiment toutes les pages lors de votre future relecture.

Les portes de la librairie s’ouvrent à votre arrivée et la délicieuse odeur de milliers de livres neufs exalte votre pouvoir d’achat. Vous vous reprenez et récitez votre litanie favorite : « Je ne connaîtrai pas la peur, car la peur tue l’esprit. Je suis venu pour une seule chose et je m’y tiendrai. ». Vous fermez les yeux pour éviter la tentation et suivez vos pieds jusqu’au rayon Science-Fiction. Vos paupières s’ouvrent sur une superbe édition de Dune : contrairement à votre volonté, vous pouvez faire confiance à vos pieds.

Objectif atteint, la saga entière est dans votre sac, vous êtes sur le point de faire demi-tour quand le beau vendeur de la dernière fois vous intercepte : « Si vous aimez le genre je peux vous conseiller d’autres titres qui vous raviront ! ». Votre cœur ne saurait dire non à cette proposition, et votre tête hoche à l’affirmative. Le libraire vous guide donc à travers les rayons et empile les livres dans vos bras.

Il vous conseille tout d’abord ce qui est souvent considéré comme la première pierre de ce qui constitue l’immense mur du genre Space Opera, sous-genre de la Science-Fiction : Star ou ψ de Cassiopée, histoire merveilleuse de l’un des mondes de l’espace, nature singulière, coutumes, voyages, littérature starienne, poèmes et comédies traduits du starien – dans son titre complet. Son auteur, d’abord pionnier de la chirurgie plastique, Charlemagne Ischir Defontenay, devient avec son surprenant roman, précurseur du genre en 1854 alors que le terme Space Opera n’apparait qu’en 1941.

Terme d’abord utilisé péjorativement, le « space opera » a conquis le cœur des lecteurs qui ont su voir plus loin que cette vaine analogie au soap opera venant d’un écrivain probablement jaloux. C’est donc plus officiellement que s’établit le genre dans les années 40, malgré l’existence de plusieurs ouvrages antérieurs. Et plus largement, il connait une montée en popularité avec la venue dans le paysage cinématographique de Star Wars et Star Trek – que vous pouvez également retrouver sous la forme de (très, très) nombreux romans.

Le genre est fascinant : il explore ce dont quoi pourrait être fait le futur lointain de notre espèce, par le point de départ du voyage dans l’espace et de l’expansion humaine interplanétaire, intergalactique, voire dans l’Univers entier. Que ce soit sous couvert de rigueur scientifique, d’humour ou encore par hyperbolisation, l’auteur cherche toujours à mettre à l’épreuve l’humanité par des sujets intemporels tels que la politique, l’économie, l’écologie, la sociologie, les ressources planétaires, les religions, les guerres, …

Isaac Asimov, auteur ultra-prolifique, est le second à être ajouté à votre pile avec le Cycle Fondation, inspiré par le fameux Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain d’Edward Gibbon, encyclopédie historique. 22 000 années nous succèdent : la nouvelle science qu’est la psychohistoire permet de prédire l’avenir, et plus précisément la Chute de l’Empire Galactique suivie de 30 000 années de barbarie avant la création d’un nouvel Empire. Hari Seldon, inventeur de la psychohistoire va donc employer les grands moyens pour réduire cette future période sombre. En 1966, le chef-d’œuvre d’Asimov se voit décerner le prix Hugo de la « Meilleure Série de tous les temps » à sa grande surprise, puisqu’il pensait, comme beaucoup, que ce prix unique irait à J.R.R. Tolkien.

Vous continuez votre exploration avec Andrew « Ender » Wiggin, un jeune garçon d’une très grande intelligence qui lui permet d’être admis à l’Ecole de Guerre : une station orbitale mise en place pour faire face à une invasion extra-terrestre agressive, les Doryphores. Se rajoute donc à la pile, le Cycle Ender d’Orson Scott Card dont les deux premiers tomes reçurent, à l’instar de Dune, le prix Hugo et le prix Nebula.

Vous remarquez que beaucoup de sagas sont sous forme de Cycle, en effet une des composantes préférées du genre est l’étalement de l’histoire sur un temps plus au moins très long tel une épopée ; après tout l’espace est indissociable du temps.


L’aventure se décline également avec le sous-genre Planet Opera, variante, dont le cadre principal de l’intrigue se limitera à une planète. On peut citer le très connu Cycle de Mars même s’il sort légèrement des codes : le voyage spatial est là, mais pas de manière traditionnelle. L’auteur, Edgar Rice Burroughs, également père de Tarzan, entraine son nouveau personnage John Carter dans d’incroyables aventures sur une Mars, nommée Barsoom, asséchée et en plein déclin, qui voit ses civilisations autrefois à leur apogée, lutter et s’affronter pour survivre. La saga, classée deuxième au prix de la « Meilleure Série de tous les temps », eut un impact considérable sur les carrières de Leigh Brackett et de son ami Ray Bradbury.

Le sous-genre évolue également avec le New Space Opera, où nos auteurs contemporains apportent des enjeux propres à notre époque. Le vendeur vous ajoute au passage La Saga du Commonwealth de Peter F. Hamilton, dans laquelle une organisation de nombreuses planètes reliées par des trous de ver permanents (Commonwealth inter-solaire) donne la possibilité à ceux qui peuvent se l’offrir, l’immortalité par l’entremise d’un rajeunissement tous les 50 ans avec une possible réorganisation de la mémoire.

Planet Opera, Space Opera et New Space Opera ont à la fois un terrain commun et chacun leurs propres règles. Mais quel que soit le cadre de l’intrigue, ces histoires n’ont pas de limites et outrepassent souvent les cases qu’on leur impose de par leur ampleur. C’est pourquoi, de manière tentaculaire, le genre se mêle parfois à la Space Fantasy, la Hard SF, l’Anticipation ou encore le Cyberpunk. Il ne faut pas oublier qu’à ses débuts, le Space Opera s’inspire des grandes aventures des Westerns, en vogue à l’époque, y ajoutant le sens de la Tragédie Antique.

Le libraire vous propose pour finir, un détour par H2G2 : Le Guide du Voyageur Galactique de Douglas Adams qui reprend les codes du genre de manière britishement loufoque. Vous ajoutez à votre PAL cet OVNI surnommé « la Trilogie en Cinq Tomes » qui, avant d’être au format livre, fût un feuilleton radiophonique à succès.

Vous vous demandez alors si vos deux séries télévisées préférées, Doctor Who et Winx Club (on ne juge pas, s’il-vous-plait) ne seraient pas en fait du Space Opera ? Vous n’osez pas demander au charmant vendeur, qui vous propose une liste partielle pour la prochaine fois : la Trilogie des Guerriers du Silence de Pierre Bordage primé par le Grand prix de l’Imaginaire et le prix Julia-Verlanger ; Les Cantos d’Hypérion de Dan Simmons qui ne compte pas moins de 8 prix littéraires ; Le Cycle du Fulgur d’E.E. Smith, 4ème dans la course « Meilleure Série de tous les temps » derrière Asimov ; ou encore Le Cycle de l’Ekumen d’Ursula K. Le Guin primé par 8 fois.

C’est donc les bras chargés d’aventures à travers l’Univers que vous sortez de la librairie, après avoir payé vos achats bien évidemment. Sur le pas de la porte, un rapide coup d’œil aux alentours vous assure que la rue est déserte. Vous brisez alors le silence d’un « Scotty, énergie ! » et disparaissez dans un nuage de particules élémentaires.

Dystopie, contre-utopie et anti-utopie. Ah c’est la même chose ?

Ca y est, vous êtes accro. Même le pot de Nutella n’arrive pas à rivaliser. C’est à peine si vous dormez. Vous avez dévoré « Hunger Games » et avalé tout cru « Divergente », sans en laisser une miette. Mais quelle est cette drogue puissante présente dans ces 6 gros volumes ? Vous faites appel à l’agent 006 qui vous répond tout simplement « la dystopie cher ami » et ajoute avec un air désolé « il n’y a aucun remède ». Le problème c’est que vous commencez à vous sentir fébrile et légèrement fiévreux : vous êtes en manque ! Que faire ? Une seule solution s’impose à vous : lire. Lire des montagnes de dystopie. Lire la suite

Littérature et Vampirisme

Votre journée de travail est finie, vous avez pile le temps de vous rendre dans votre librairie préférée pour acquérir votre prochaine insomnie. Vous flânez aléatoirement dans les rayons et épidermiquement vous avez la sensation d’être suivi, observé… Vous regardez discrètement autour de vous, et apercevez furtivement des yeux perçants et un sourire carnassier. Vous ne vous sentez plus du tout en sécurité dans cet endroit pourtant chéri. En reculant vous bousculez le vendeur, plutôt charmant soit dit en passant, qui vous demande si vous avez besoin d’un renseignement. Après un « non merci, je regarde juste » timide et rougissant, vous regardez une nouvelle fois autour de vous. Ces yeux, ce sourire, mais oui ! Vous êtes cerné, pas par des stalkers mais par des vampires ! Oui des vampires ! Ils s’affichent sur plus de la moitié des rayons, c’en est à perdre son sang froid. Lire la suite